Entamée en 1992 lors d’une première arrestation, rebondissant en janvier 2004 lors de sa condamnation à vingt ans de prison par la cour d’assises de Liège dans ce qu’on a appelé ‘l’affaire Cools’, l’histoire judiciaire de Richard Taxquet n’est pas close en juillet 2011. On se souvient du recours qu’il introduisit auprès de la Cour européenne des droits de l’homme contre le verdict de la cour d’assises de 2004. En janvier 2009, la Belgique fut condamnée car sa législation ne prévoyait pas d’assortir les verdicts de culpabilité d’une quelconque motivation (cliquez ici). Tout en formant un recours contre l’arrêt de la Cour strasbourgeoise devant sa Grande Chambre, la Belgique modifia en décembre de la même année sa législation sur la Cour d’assises (cliquez ici). Le 16 septembre 2010, la Grande Chambre de la Cour européenne confirma ses premières conclusions : le procès d’assises de 2004 était bel et bien inéquitable (cliquez ici).
La Cour d’assises est aujourd’hui régie par une procédure conforme aux exigences d’un procès équitable, mais il n’en demeure pas moins que la vérité judiciaire reste celle que la Cour d’assises de Liège a établie en 2004. Monsieur Taxquet est donc coupable… fusse sa culpabilité déclarée au terme d’un procès reconnu inéquitable.
On apprit cependant en mai 2011 que Richard Taxquet avait introduit à la Cour de cassation un recours en réouverture de la procédure. Il soutient en substance que, si le procès qui le condamna fut inéquitable, il faut le recommencer. De quoi s’agit-il ?
Mr Taxquet a usé de la faculté prévue par une loi de 2007. Celle-ci organise la possibilité de demander à la Cour de cassation de rouvrir la procédure - ordonner un nouveau procès - lorsque le jugement de condamnation a été sanctionné par la Cour européenne des droits de l’homme. Il faut que le vice, la violation de la Convention européenne des droits de l’homme dont la décision est affectée, soit sérieux au point d’avoir pu influer sur la condamnation, et que les conséquences négatives très graves de cette condamnation portent toujours effet. Le recours doit être introduit dans les six mois de la date à laquelle l’arrêt de la Cour européenne devient définitif. Mr Taxquet estime que ces conditions sont remplies.
Mi-juillet 2011, on attendait encore la décision de la Cour de cassation.
Dans l’hypothèse où cette haute cour reconnaît le bien-fondé du recours en réouverture de la procédure, l’on pourrait voir s’organiser un nouveau procès d’assises. Un procès dont les débats pourraient bien prendre une nouvelle tournure.
En effet, le temps a passé. Comment pouvoir juger encore un acte commis en 1991 ? Quelle fiabilité accorder encore à d’éventuels témoignages ?
Comment se défendre ? On touche ici à la notion de ‘délai raisonnable’. En d’autres termes, le temps anormal, déraisonnable, mis par les autorités pour mettre quelqu’un en jugement ne peut lui porter préjudice. Or le temps qu’aura pris cette affaire a être jugée ne peut être imputé à Mr Taxquet. Il s’est légitimement adressé à la Cour européenne, qui a accueilli son recours. S’il apparaît qu’une défense correcte en est à présent compromise, les poursuites devront être déclarées irrecevables : il ne pourrait plus être jugé et devrait être considéré comme innocent (cliquez ici pour lire l’article de D. Ribant relatif aux différentes sanctions attachées à la violation du délai raisonnable). Sans faire de la fiction judiciaire, on peut dire qu’il n’est pas exclu que la saga judiciaire de Richard Taxquet se termine en queue de poisson. Issue peut-être peu satisfaisante pour le profane, mais l’honneur de la justice est néanmoins de se plier aux règles et principes qui la fondent… Affaire à suivre donc.