Outre ses fonctions principales, par exemple connaitre des appels des décisions de la chambre du conseil des recours en matière de détention préventive, la chambre des mises en accusation joue un rôle peu connu de contrôle de la régularité des instructions pénales, comme on l’a vu récemment dans le cadre du Qatargate.
Explications par Lucie Breyer, assistante-chercheuse à l’UCLouvain, et Camille Gambi-Arnold, assistante à l’UCLouvain et doctorante à l’UCLouvain et à l’Université d’Ottawa, nous livrent plus de détails.

1. À la fin de l’année 2022, différents députés du Parlement européen ont été inculpés pour des faits de corruption dans l’affaire que la presse appellera le Qatargate. On reproche, plus exactement, à ces députés d’avoir tenu publiquement des prises de position favorables à l’égard de différents pays (et notamment du Qatar) en échange de sommes d’argent.
L’affaire est actuellement au stade de l’instruction et une inculpée a saisi la Chambre des mises en accusation, demandant qu’elle opère un contrôle de la régularité de la procédure. L’arrêt de cette juridiction est attendu pour septembre 2024.

2. Les développements qui suivent se concentreront sur deux points :

  • l’étendue du contrôle de la régularité de la procédure effectué par la chambre des mises en accusation, ainsi que les conséquences possibles de ce contrôle (A.) ;
  • les modes de saisine de la cette juridiction lors de ce type de contrôle (B.).

3. Précisons toutefois préalablement deux points.
Au-delà du contrôle de la régularité de la procédure, la chambre des mises en accusation possède une série d’autres compétences, comme celle du renvoi devant la cour d’assises des crimes et des délits politiques et de presse.
Elle constitue également la juridiction d’appel en matière d’instruction et a d’ailleurs été invitée à exercer cette compétence dans l’affaire du Qatargate, s’agissant de la question du maintien en détention préventive de certains des inculpés.

4. Les audiences de la chambre des mises en accusation se tiennent en principe à huis clos, c’est-à-dire sans que le public puisse y assister. Il est toutefois possible de demander la publicité des débats dans le cadre de certaines procédures.
Dans le cadre du contrôle de la régularité de la procédure dans l’affaire du Qatargate, les avocats de la défense avaient demandé que la chambre des mises en accusation de Bruxelles siège en audience publique mais la chambre n’a pas accédé à cette demande.

A. Étendue et conséquences du contrôle de la régularité mené par la chambre des mises en accusation

5. Le contrôle de la régularité de la procédure vise à identifier les éventuelles irrégularités, omissions ou causes de nullités qui entacheraient la procédure.
Peuvent également être soulevées lors de ce type de contrôle, les causes d’irrecevabilité et d’extinction de l’action publique, comme par exemple, l’écoulement d’un délai trop long entre la commission de l’infraction et le jugement définitif.

6. Dans le cas où la chambre des mises en accusation constaterait un problème de régularité, elle se devra de préciser la sanction qu’il conviendra d’y attacher en veillant à indiquer si les pièces annulées et ensuite retirées du dossier pourraient encore être mobilisées ou non dans la suite de la procédure.
Précisons que, dans le cas où la chambre des mises en accusation s’est prononcée au sujet de la régularité de la procédure, ces questions seront considérées comme traitées et ne pourront plus être soulevées devant la juridiction de fond.

B. Les modes de saisine de la chambre des mises en accusation

7. La chambre des mises en accusation peut être amenée à exercer ce contrôle de la régularité de la procédure dans plusieurs cas.

8. Elle y accède tout d’abord lors du règlement de la procédure, audience de fin d’instruction lors de laquelle la chambre décide des suites à donner à l’affaire en question.
La chambre des mises en accusation peut aussi exercer ce contrôle d’office, à tout moment, relativement à une instruction en cours.
Elle peut également l’exercer d’office ou sur demande du ministère public ou d’une des parties dans tous les cas de saisines régulières, c’est-à-dire dans tous les cas où cette chambre peut être saisie pour un autre motif que ce contrôle en question. Dans ces cas, le contrôle de la régularité se greffe à une autre procédure. Il en est ainsi notamment lorsque l’instruction n’est pas clôturée après une année. Dans ce type de situation, l’inculpé ou la partie civile se voient offrir la possibilité de saisir la chambre des mises en accusation et, à cet effet, celle-ci pourra alors contrôler, entre autres, la régularité de l’instruction.

Enfin, soulignons que la chambre des mises en accusation peut aussi exercer ce contrôle de la régularité de la procédure à l’initiative du ministère public. Ce dernier peut, à tout moment de l’instruction, saisir la chambre des mises en accusation pour lui demander de contrôler la légalité et la régularité de la procédure, s’il l’estime opportun.

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