En quoi consiste l’internement ?
1. Le 1er octobre 2016, la loi du 5 mai 2014 ‘relative à l’internement’ entrait en vigueur.
Dans une volonté de limiter le nombre de décisions prononcées, cette loi est venue remplacer celle du 1er juillet 1964, applicable jusqu’alors. Désormais, seuls les faits ayant provoqué une atteinte à l’intégrité physique ou psychique d’un tiers peuvent mener à un internement.
2. La vision de cette mesure se veut évolutive : la situation du justiciable interné sera réexaminée au moins chaque année pour les internés placés et avant la fin du délai d’épreuve pour les internés bénéficiant d’une autre modalité.
3. Trois éléments-clés de la loi peuvent être mis en avant :
– l’importance du trajet de soins : l’accompagnement des personnes internées s’insère dorénavant dans un trajet de soins ; la mesure d’internement vise à protéger la société et à dispenser les soins nécessaires et adaptés au justiciable en vue de lui permettre de se réinsérer dans la société ;
– l’internement n’est plus d’emblée considéré comme une mesure à durée indéterminée : la loi prévoit chaque année un examen systématique des modalités d’exécution possibles pour les internés placés et fixe un délai d’épreuve pour les autres modalités d’exécution de l’internement ;
– la place de la victime : elle est désormais prise en considération dans le cadre de la procédure d’internement, elle peut être informée des modalités d’exécution de l’internement ou être entendue lors des audiences au sujet des conditions qu’elle souhaiterait voir imposer à la personne internée.
4. Sur le plan de la procédure, on constate une volonté de professionnalisation de l’instance décisionnelle.
La chambre de protection sociale (CPS) vient ainsi remplacer la commission de défense sociale : composée d’un juge professionnel, qui joue le rôle de président, d’un assesseur en psychologie clinique et d’un assesseur en réinsertion sociale, la chambre est une chambre spécialisée du tribunal de l’application des peines (TAP).
Le rôle des Maisons de Justice en matière d’internement
5. En internement, les maisons de justice interviennent à plusieurs stades de la procédure.
Les enquêtes sociales des Maisons de Justice
6. Lorsque le justiciable qui fait l’objet d’une décision d’internement n’est pas incarcéré immédiatement, un assistant de justice va réaliser une enquête sociale dont l’objectif est d’aider la chambre de protection sociale à désigner un établissement en vue du placement du justiciable ou à octroyer une modalité d’exécution de l’internement.
Pour ce faire, il va rencontrer le justiciable, son éventuel milieu de vie ainsi que le réseau de soin qui encadrera le justiciable.
7. En outre, à tout moment de la procédure, les autorités compétentes peuvent demander à un assistant de justice de de réaliser une enquête sociale.
Celle-ci peut porter sur une ou plusieurs des modalités suivantes : permission de sortie, congé, évaluation du congé, détention limitée, surveillance électronique et libération à l’essai.
Dans ce cas, l’assistant de justice effectue une visite au domicile au sein du futur milieu d’accueil du justiciable. Au cours de cet entretien, l’assistant de justice va recueillir toutes les informations nécessaires pour éclairer l’autorité sur la composition du milieu d’accueil, les relations entretenues avec le justiciable, sa vision du trouble mental du justiciable en lien avec les faits qui ont été commis, etc.
L’enquête sociale vise également à analyser les possibilités d’accueil et l’engagement du milieu d’accueil à l’égard du justiciable
Les guidances effectuées par les Maisons de Justice
8. Les assistants de justice sont mandatés pour suivi de la personne internée :
– par le ministère public auprès de la juridiction qui a ordonné l’internement lorsque personne internée est laissée en liberté moyennant le respect de conditions jusqu’à la première audience de la chambre de protection sociale ;
– par la chambre de protection sociale elle-même lorsqu’elle octroie à la personne internée une détention limitée, une surveillance électronique ou une libération à l’essai.
9. L’assistant de justice travaille au départ de la situation du justiciable et des conditions imposées par l’autorité à ce dernier.
La mission de l’assistant de justice est d’assurer une guidance à l’égard du justiciable dans le but d’éviter la récidive et de soutenir la réinsertion sociale de ce dernier.
Le travail de l’assistant de justice est double : il aide le justiciable à respecter ses conditions et il en vérifie le respect.
10. Tout au long de la guidance, une attention particulière est portée sur la continuité ou la mise en place du trajet de soins à la lumière de la philosophie de la loi.
Pour ce faire, l’assistant de justice collabore avec le réseau de soins en santé mentale.
L’assistant de justice est attentif à donner au justiciable une place centrale dans le processus pour qu’il puisse y participer, dans la mesure de ses moyens, de la manière la plus active possible. L’internement étant justifié par le trouble mental du justiciable au moment des faits commis, l’objectif de non-récidive est notamment lié à la bonne évolution de sa santé mentale et conditionné par sa participation au processus.
11. En fonction de la situation de chaque justiciable (situation d’accueil, santé mentale, etc.), l’assistant de justice évalue les modalités selon lesquelles il effectue ses entretiens : au bureau, à domicile, dans l’institution, seul ou accompagné, etc., mais il y a toujours plusieurs rencontres organisées avec le justiciable dans son contexte de vie (à son domicile s’il vit seul, au sein de son milieu d’accueil ou dans son institution). L’assistant de justice a des contacts réguliers avec le réseau de soins en vue de récolter toutes les informations utiles dans le cadre du mandat confié par l’autorité mandante. Ces démarches doivent notamment permettre de procéder aux vérifications liées au dispositif conditionnel.
12. Les communications entre la chambre de protection sociale et les assistants de justice se font par le biais de rapports, dont une copie est adressée au ministère public.
L’assistant de justice fait rapport dans le mois de l’octroi de la modalité, puis à chaque fois qu’il l’estime utile ou que le ministère public ou la chambre de protection sociale l’y invite et au moins une fois tous les six mois.
13. Lorsque le justiciable est en libération à l’essai, l’assistant de justice transmet un rapport final à la chambre de protection sociale, trois mois avant la fin du délai d’épreuve. Ce rapport a pour objectif de faire le point sur le déroulement de la guidance et d’apporter les éléments qui permettront à l’autorité d’apprécier si les conditions de la libération définitive sont réunies ou si la libération à l’essai doit être prolongée.
L’intervention des services d’accueil des victimes des Maisons de Justice
14. Les assistants de justice qui travaillent au sein des services d’accueil des victimes des Maisons de Justice prennent systématiquement contact avec toutes les victimes concernées par une décision d’internement afin que ces dernières puissent être informées de leurs droits.
Si les victimes le souhaitent, les assistants de justice peuvent les aider à rédiger une « fiche victime ». Il s’agit du document qui reprend leur souhait d’être informées ou entendues dans le cadre des procédures d’octroi de modalités d’exécution de l’internement, sur les conditions qu’elles voudraient voir imposer dans leur intérêt en cas d’une éventuelle libération.
À la demande des victimes, les assistants de justice peuvent également les accompagner lors de l’audience de la chambre de protection sociale si elles ont exprimé le souhait d’être entendues.
Témoignage d’un assistant de Justice
15. D’ici peu, Justice-en-ligne publiera, dans sa rubrique consacrée aux Maisons de Justice, le témoignage d’un assistant de Justice, qui fera part de son expérience sur le terrain avec les personnes soumises au régime de l’internement.
Votre point de vue
skoby Le 4 février 2020 à 11:15
Ces procédures me paraissent très satisfaisantes sur le plan du raisonnement, mais
probablement assez compliqué pour le suivi à réaliser.
La Justice, dans notre pays, a un tel retard dans les procédures, qu’on se demande comment ces procédures peuvent être suivies pour être efficaces.
Combien d’années d’attente pour le jugement des attentats de Bruxelles ???
10 d’attentes pour le récent jugement des 3 médecins dans l’euthanasie d’une
patiente, atteinte de souffrances mentales !
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