1. L’Observatoire international des prisons (O.I.P.) a pour mission d’observer les conditions de détention dans nos prisons, d’alerter et de dénoncer les manquements aux droits humains dont la population carcérale peut faire l’objet. Il se base pour ce faire sur un réseau d’informateurs (détenus, famille, travailleurs en milieu carcéral, avocats, etc.) et recoupe les informations obtenues.
2. Deux éléments marquants peuvent être relevés, parmi d’autres, dans son rapport 2014-2016.
Le non-respect des décisions de justice et des obligations internationales de la Belgique
3. Premièrement, la non-exécution des décisions de justice et des recommandations internationales par la Belgique a été soulignée.
Dans un arrêt Vasilescu c. Belgique, rendu le 25 novembre 2014 , la Cour européenne des droits de l’homme a enjoint à la Belgique de mettre un terme aux problèmes découlant de la surpopulation, du manque d’hygiène et de la vétusté dans les établissements pénitentiaires (détenus fumeurs avec des non-fumeurs, matelas à même le sol, cellules sans toilette, etc.) ; cet arrêt a été évoqué sur Justice-en-ligne par Harold Sax (« La surpopulation carcérale : un problème structurel en Belgique comme en Italie, dénoncé comme tel par la Cour européenne des droits de l’homme ») .
Ces problèmes, selon la Cour, revêtent un caractère structurel.
Comme seule réponse, l’État avance fièrement ses différents « masterplans », portant exclusivement sur la construction de nouvelles prisons.
Or l’extension du parc carcéral n’entraînera pas la fermeture des bâtisses insalubres. De plus, les nouvelles prisons, déshumanisées sur de nombreux aspects (par exemple par le remplacement des agents par des caméras), n’offrent pas plus de travail ou de formation aux détenus ; au contraire, par leur éloignement géographique et leur inaccessibilité en transports en commun, elles contribuent à la désocialisation de la personne détenue.
4. Les choix financiers doivent également être pointés.
L’endettement de l’Etat sur vingt-cinq ans dans des partenariats publics-privés contestables à bien des égards va de pair avec la réduction du nombre d’heures prestées par les agents pénitentiaires et le service psycho-social.
Bref, la Belgique s’entête à investir dans le sécuritaire et les murs, et en paye le prix fort.
5. Par une série d’arrêts, dont le dernier date du 6 septembre 2016, la Cour européenne des droits de l’homme a rappelé à la Belgique qu’une annexe psychiatrique de prison ne peut être considérée comme un lieu de soins. Cet arrêt a également été commenté sur Justice-en-ligne et mis dans leur contexte, par un psychiatre (I. Pelc, « Des internés en prison, ou deux logiques contradictoires : la vision d’un psychiatre » ) et une avocate (F. Vansiliette, « Les internés : la fin d’une politique des oubliettes ? » )
Il est inadmissible de détenir des malades et/ou handicapés mentaux, reconnus irresponsables de leurs actes par la justice, dans les conditions qui sont les leurs actuellement (surpopulation dans les annexes, mélange de détenus avec des pathologies très diverses, manque crucial de soins et d’accompagnement, aucune garde médicale la nuit, violence liée à la promiscuité et l’absence de soins, etc.). Une nouvelle loi vient d’entrer en vigueur le 1er octobre 2016 en matière d’internement… qui ne supprime pas les annexes psychiatriques des prisons !
6. Autre exemple, les conditions de détention apocalyptiques connues par les détenus lors des grèves à répétition des agents pénitentiaires.
Le Comité de prévention contre la torture et les traitements inhumains et dégradants du Conseil de l’Europe a menacé la Belgique d’une déclaration publique si aucun service garanti n’était organisé dans les prisons.
Là encore pourtant aucune loi n’est intervenue pour mettre fin à la situation actuelle.
Lors de la dernière grève de mai 2016, des détenus ont saisi la justice pour faire respecter leurs droits. Les décisions de justice n’ont pas été respectées par le Ministre.
Le non-sens des peines de prison
7. Le deuxième thème mis en avant lors de la conférence de presse est le non-sens de cette peine de prison, chère (au moins 40 € par jour et par détenu) et inefficace (les chiffres de la récidive le démontrent), qui reste avant tout une institution « pour pauvres », qui, loin de régler les problèmes, les y précipitent un peu plus (isolement, pauvreté, perte d’emploi, contagion criminelle, défaut de perspectives d’avenir, absence d’espoir, de soins de qualité, de respect, etc.).
8. La prison est là pour faire croire, pour jeter de la poudre aux yeux. A l’O.I.P., nous sommes pourtant convaincus que la sécurité n’est pas dans les murs ….
Pour en savoir plus et télécharger la « notice » 2016 contenant le rapport dans son intégralité : www.oipbelgique.be.
Votre point de vue
skoby Le 19 février 2017 à 11:54
Une fois de plus d’accord avec Madame Gisèle Tordoir pour ses réponses sensées.
Mais je tiens à ajouter que je suis d’accord sur le vétusté de certains bâtiments
qu’il faudrait absolument restaurer, en plus de la construction de nouvelles prisons.
Mais arrêtez de croire qu’on peut supprimer les prisons. Grâce à l’Europe
qui a cru bon de faire rentrer des ex-pays de l’Est, nous avons plein de roumains
qui viennent voler et attaquer nos habitants. Et il n’y a pas que les roumains.
D’ailleurs je trouve inadmissible que la Justice essaye de nous faire croire qu’ils
jugent avec sévérité, car les lourdes peines ne sont quasi jamais exécutées.
Les condamnés sont libérés bien plus tôt que ce qui était prévu par leur sanction
judiciaire.
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Gisèle Tordoir Le 18 février 2017 à 06:50
Les chiffres dénonçant la surpopulation carcérale, chez nous mais pas seulement, doivent impérativement nous amener à imposer que les peines de prison à l’encontre de binationaux et/ou de non belges soient purgées dans le pays d’origine, plus chez nous. Je suis persuadée que c’est seulement ainsi que l’on pourra retrouver des conditions plus humaines, moins dégradantes pour toutes et tous, concernés par le milieu carcéral. La prison n’est, certes, pas la seule solution mais elle reste une réponse sécuritaire pour la société.
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Amandine Le 17 février 2017 à 19:46
Merci à l’Observatoire International des Prisons pour son travail et pour ces informations.
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