« Mon avocat converse avec celui de mon adversaire ! » : comment est-ce possible ?

par Lawrence Muller - 17 décembre 2014

Certains justiciables s’étonnent de voir leur avocat converser avec l’avocat de leur adversaire pendant ou après l’audience.

Cela surprend et choque même parfois les justiciables concernés.

Ceux-ci sont-ils pour autant moins bien défendus ? Certainement pas : la qualité d’une prestation d’avocat repose avant tout sur sa compétence professionnelle ; elle n’est pas incompatible avec le savoir-vivre entre confrères qui nécessairement sont amenés à se croiser très fréquemment et peuvent établir des liens d’ordre personnel.

Lawrence Muller, avocat au barreau de Bruxelles, ancien membre du Conseil de l’Ordre français des avocats du barreau de Bruxelles, y revient ci-après.

Il est un fait que de par la nature même de leur profession, les avocats se connaissent souvent bien.

Se retrouver fréquemment devant les cours et tribunaux, entre praticiens des mêmes matières juridiques, crée en effet des liens.

Mais même s’ils se rencontrent pour la toute première fois à l’occasion d’un dossier, ce qui arrive aussi, le fait pour les avocats de converser pendant ou après l’audience n’est que la manifestation d’un élémentaire savoir-vivre.

Voir dans cette attitude de civilité la preuve d’une collusion entre les avocats est une grave erreur.

En effet, les avocats défendent à l’audience les intérêts de leurs clients respectifs, mais ils n’épousent pas la cause de ceux-ci, et leur interdire de converser ensemble reviendrait à les placer dans la situation des clients eux-mêmes, c’est-à-dire dans une situation de conflit.

Or, ce n’est pas parce qu’ils défendent des parties en conflit que les avocats de ces parties doivent être en conflit entre eux.

L’avocat doit certes éprouver de l’empathie pour son client et sa cause, mais il ne doit certainement pas aller jusqu’à ressentir dans son âme, voire dans sa chair, ce que vit son client.

J’ajoute qu’il est des procès en lesquels le différend qui les oppose n’empêche pas les parties de se parler, voire de se serrer la main.

Pour conclure, l’expérience apprend que le fait pour des parties à un procès d’avoir comme conseils des avocats qui s’apprécient mutuellement est en réalité le gage que leur affaire sera traitée de la meilleure manière possible.

La justice est en effet aussi une affaire de sérénité, ce qui permet aussi aux juges de trancher les litiges de la manière la plus objective et « dépassionnalisée » possible.

Mots-clés associés à cet article : Avocat, Barreau, Déontologie,

Votre point de vue

  • Gisèle Tordoir
    Gisèle Tordoir Le 18 décembre 2014 à 15:08

    La manifestation d’un élémentaire savoir-vivre réside, à mon avis, davantage dans le fair-play, la politesse, le respect, la courtoisie, le fait d’apporter une réponse à des questions posées, à des observations et/ou remarques faites, à des précisions et éclaircissements demandés qu’en des simulacres d’entente, de discussions entre avocats. La comédie est d’autant moins acceptable quand l’un des avocats est un ex-bâtonnier. Il en va de même pour les courriers échangés entre avocats ; courriers dont l’on n’a jamais (ou que trop rarement) aucune trace et cela, sous le prétexte de la confidentialité... J’en veux pour preuve et par expérience personnelle que lorsque votre affaire est terminée et que vous demandez votre dossier à votre avocat, ce dossier fait l’objet d’un nettoyage approfondi voire méticuleux avant de vous être rendu. De plus, des frais vous sont réclamés pour le récupérer notamment pour avoir été gardé (archivé) par votre avocat. Le capital confiance, indispensable et idéal lors de toute relation "client/avocat" peut malheureusement se voir ébranlé...Il est préférable de faire ponctuellement le point avec son avocat, lui dire les doutes rencontrés. Mais il faut impérativement que l’avocat soit honnête avec son client. La confiance se mérite, s’entretient ; elle ne résiste pas à la déception, l’interrogation durable. La sérénité pour tous est à ce prix.

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  • Steeve Clabots
    Steeve Clabots Le 18 décembre 2014 à 02:22

    Étant un simple justiciable , qui plus est , disposant de toutes mes facultés mentales et capable d’analyser et de comprendre ce qui se joue sous mes yeux , je souhaiterais tout de même apporter mon expérience à ce sujet .
    Dans mon cas , en cours d’appel , mon avocat n’ayant vraissemblablement pas le moindre courage de me représenter , je vois débarquer un novice à sa place que je n’ai jamais vu auparavant ...
    Cet avocat papote avec l’avocat de mon agresseur bien avant que ne commence l’audience et ce au sein même de la salle . Quand il s’aperçoit que je les observe , les deux décident de sortir un bon moment afin de poursuivre leur petite entrevue . Ce qui m’a marqué , c’est que mon avocat feint de me regarder en quittant la salle . Sur l’instant , je n’y ai prêté que peu d’importance . Mais la suite en a été désastreuse pour moi . Je ne jette pas la pierre sur tous les avocats , loin de là . Mais il serait quand même bon que certains avocats évitent de prendre leurs clients pour des idiots aveugles . Notre système judiciaire belge est truffé de joyeux lurons qui parce qu’ils portent la robe fait d’eux des personnes respectables voir intouchables . Ne nous voilons pas la face , les magouilles sont légion et superbement menées au détriment , ma foi , de bons nombres de citoyens honnêtes dans ce pays .

    • Georges-Pierre TONNELIER
      Georges-Pierre TONNELIER Le 18 décembre 2014 à 12:30

      Cher Monsieur Clabots,

      Autant je pense qu’il est une bonne chose que les avocats s’entretiennent de la situation de leur(s) client(s) respectif(s), dans l’intérêt de ceux-ci, avec la distance vis-à-vis du litige qui doit les caractériser par rapport à eux, autant je partage votre ressenti, l’ayant déjà expérimenté moi-même, en tant que justiciable.

      C’est pourquoi un autre élément, capital, intervient dans la relation entre l’avocat et son client : c’est la confiance. Le client doit avoir confiance en son avocat, comme le patient en son médecin. C’est un condition indispensable à la réussite de leur collaboration.

      Si vous sentez (mais c’est parfois trop tard lorsque l’on se retrouve devant la Cour d’appel) que vous n’avez pas confiance en votre avocat, il ne faut pas hésiter à lui en parler, voire à changer de conseil si la relation avec lui ne peut pas être rétablie.

      Georges-Pierre Tonnelier
      Juriste spécialisé en droit des nouvelles technologies

    • Steeve Clabots
      Steeve Clabots Le 18 décembre 2014 à 15:04

      Cher Monsieur Tonnelier ,

      J’abonde pleinement dans votre sens .
      Il est vrai que j’ai certainement été très naïf dans l’affaire qui m’occupe .
      Quant à la communication avec mon avocat , après vérification de bon nombre d’éléments assez douteux concernant le comportement de mon avocat avec moi ( absence de communication alors qu’il s’était engagé sur L’HONNEUR à tout mettre en oeuvre pour me défendre ) , je lui ai fait part de mes remarques par mail . Vu que je ne recevais aucune réponse de sa part , je lui ai adressé un nouveau mail en stipulant que j’en aviserai le bâtonnier par rapport à son comportement avec moi . Oh , quelle surprise fut la mienne quand il m’a répondu sèchement que " LA JUSTICE FONCTIONNE BIEN , VOUS MOINS " et que si je n’arrêtais pas mes " IDIOTIES" , il prendrait des mesures légales afin de ne plus avoir à me lire . N’empêche , je ne suis pas du genre à baisser la tête devant ce type de personnes qui confondent justice et pognon . Imaginez-vous : tentative de meurtre sur ma personne , incapacité permanente du bras gauche ( douleurs chroniques ) depuis 8 ans et mon agresseur libre comme l’air . En effet , j’en ai parlé à d’autres avocats belges et également étrangers .

      Bien à Vous ,

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